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ILERI-Défense

Mali : que cache le masque de Ghost ? Par Jean Dominique Merchet

22 Janvier 2013 , Rédigé par ileridefense Publié dans #Afrique

Une photo d'un militaire français au Mali fait le buzz sur internet.


Mali : que cache le masque de Ghost ?
Cette image fait le tour d'internet. Elle a été prise dimanche au Mali par un photographe de l'AFP, Issouf Sanogo. Elle est très forte, très belle. Elle montre un militaire français, sans doute un légionnaire du 1er REC, à Niono, devant un blindé léger léger ERC 90 Sagaie. C'est une photo posée, qui est donc le fruit d'un accord entre le militaire et le photographe. 
Le militaire porte un foulard sur la visage, qui représente une tête de mort. Ce n'est évidemment pas une pièce d'uniforme reglementaire, mais un produit dérivé d'un jeu vidéo de guerre extrêmement populaire, Call of Duty. Il représente le masque du lieutenant Simon "Ghost" Riley. 

Interrogé par la presse sur cette image et sur le comportement de ce militaire, l'état-major des armées a jugé celui-ci "inacceptable", estimant quecelle-là n'était "pas représentative de l'action que mène la France au Mali".  En privé, les officiers se lâchent : "c'est complètement con !"  On peut penser  que le militaire en question n'aura pas les félicitations de son capitaine... 

Mais cette image et sa très large diffusion sur internet disent beaucoup de choses, sur les médias comme sur l'image de la guerre. 

1) La guerre réelle et la guerre fantasmée se percutent sur cette image. Les jeunes militaires d'aujourd'hui jouent aux jeux vidéos depuis leur enfance. La première version de Call of Duty date de 2003 - quel âge avait alors le militaire pris en photo ? Une quinzaine d'année sans doute... L' attrait des engagés pour le métier des armes doit plus aux jeux de guerre qu'à la lecture des récits de Dien Bien Phu, qui peut en douter ? 

2) Cette image renvoie à d'autres plus terribles - celle des "guerriers" du Liberia et de Sierra Leone, qui aimaient se déguiser de manière effrayante, mêlant des références contemporaines et des pratiques de sorcellerie. Ces milices commirent d'épouvantables crimes là où elles sévirent. Autre référence plus ou moins explicite, le vaudou. Autant dire qu'il faut mieux manier ces images avec prudence sur le continent africain. 

3) Les médias français se sont d'autant plus saisis de cette image qu'ils se plaignent depuis plusieurs jours du peu d'images et d'informations sur la guerre au Mali. Peu d'images ? Il y a actuellement 50 équipes de presse "enbedded" au sein des forces françaises... 
Le problème est qu'il n'y a pas grand chose à voir : la guerre au Mali n'est quand même pas la bataille de la Marne. De part et d'autres, les effectifs concernés sont très faibles et opèrent sur un territoire très vaste. Il y a très peu de combats, pour ainsi dire aucun. Quelques frappes de précision sur les arrières, peut-être quelques escarmouches avec les patrouilles de forces spéciales derrière deux kékés... 
Entre les discours politiques tenus à Paris sur le thème de l' "offensive" terrestre et la réalité du terrain, il y a un immense gap... dans lequel tombent les médias et le grand public, forcément soupçonneux et frustrés. 
Et cette frustration explique l'intérêt porté à une image belle, pleine de sens et en même temps parfaitement anecdotique. 

Mardi 22 Janvier 2013
Jean-Dominique Merchet
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