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ILERI-Défense

L'armée française peine à recruter et fidéliser ses troupes

23 Octobre 2012 , Rédigé par ileridefense Publié dans #France

 

Des militaires français embarquent, le 28 mars 2012, à Kaboul, dans l'avion qui les ramène en France.

 

L'armée doit mieux traiter sa troupe si elle veut continuer à attirer des jeunes. L'alerte vient d'un organisme indépendant, le Haut comité d'évaluation de la condition militaire. Le sort des 89 000 "militaires du rang", ces soldats, matelots et autres caporaux sous contrat à durée déterminée, qui forment le gros des effectifs, n'est pas des plus enviables, explique le Haut comité dans son sixième rapport annuel, mis en ligne mardi 23 octobre.

Ce document touffu, étayé de nombreux chiffres, est une mine pour la sociologie militaire. Il est aussi un guide précieux pour qui voudra peser les avantages du métier des armes parmi ceux des autres agents de l'Etat. L'on y découvre ainsi qu'un ménage dont l'un des conjoints est militaire possède un niveau de vie moyen de 18 % inférieur au couple d'un fonctionnaire civil, à catégorie socio-professionnelle équivalente, et ce, quelque soit le grade.

L'accent mis sur la troupe dans l'édition 2012 n'est pas un hasard, au moment où la France retire ses forces d'Afghanistan et alors que les restrictions budgétaires pèsent lourdement sur le moral de l'institution.

"La professionnalisation des armées s'est bien passée, mais nous arrivons au bout des formules qui avaient alors été pensées. Il faut vraiment tenir compte du fait que les militaires du rang sont des professionnels, dans la manière dont on les traite, on les forme, on gère leur carrière", défend Michel Pinault, président du comité et membre du Conseil d'Etat.

Ainsi, le contrat de cinq ans renouvelable est trop court, car il n'offre pas assez de visibilité aux personnes : "Des gens qui en sont à leur troisième renouvellement de contrat ne savent pas s'ils seront renouvelés dans les deux mois qui viennent", déplore M. Pinault.

DES DÉLAIS DE RECRUTEMENT "BEAUCOUP TROP LONGS"

Le comité propose un contrat de huit ans, qui respecterait la nécessité d'avoir une armée jeune et en bonne condition. Cela permettrait, de plus, de faire des économies dans l'énorme machinerie déployée par l'armée pour recruterformer et fidéliser ses troupes. Chaque année, il faut gérer ainsi 13 800 embauches et 16 300 départs de soldats. Une gageure dont témoignent les délais de recrutement, six à huit mois, jugés "beaucoup trop longs" malgré la prime d'engagement. Deux défis surgissent : dans l'armée de terre, on ne trouve plus qu'1,5 candidat pour 1 poste, "des chiffres préoccupants" selon le Haut comité d'évaluation.

Par ailleurs, "la courbe des départs spontanés des militaires du rang est en constante augmentation" sur la décennie 2000-2010. En 2010, 27 % des soldats ont quitté leur poste un an après leur engagement, alors que l'armée de terre s'était fixé 15 % au plus. Pour garder ces soldats, le comité suggère de donner un vrai statut aux "vieux briscards". Cette perspective leur permettrait de mettre à profit leur expérience opérationnelle, en les délivrant de l'obligation de passersous-officier pour rester dans l'armée.

GRAVE DYSFONCTIONNEMENT DU LOGICIEL DE GESTION DES PAIES

Mettre la priorité, y compris financière, sur les mesures de soutien aux militaires de la base et à leur famille : la proposition sera remarquée, alors qu'un grave dysfonctionnement lié au nouveau logiciel de gestion des paies "Louvois"exaspère – et désespère – des milliers de soldats depuis plus d'un an.

"C'est une affaire très difficile, avec des impacts considérables. Nous en avions parlé au président de la République dès septembre 2011", explique le président du Haut comité. Mais le problème, souligne-t-il, a fait l'objet d'un déni dans l'armée de terre pendant des mois, et le régler prendra du temps. L'épisode, ajouté aux restructurations tous azimuts des régiments depuis 2008, pourrait avoir détérioré l'image de l'armée.

"La marche à franchir entre la vie civile que mène un jeune et la vie militaire est de plus en plus haute, il faut tenir compte de cet écart", souligne encore M. Pinault. Et d'avertir : "il y a finalement très peu de gens qui viennent vers l'armée parce qu'ils ont un problème d'emploi. La crise est souvent invoquée comme un moment plus propice pour recruter des militaires. C'est une mauvaise idée"

Nathalie Guibert

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