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ILERI-Défense

Sociétés militaires privées : la France ne se décide toujours pas

25 Février 2012 , Rédigé par ileridefense Publié dans #Sociétés Militaires Privées

Les sociétés militaires privées françaises rencontrent les plus grandes difficultés à signer des conventions.

 

À ce jour, la France a décidé de laisser le marché des sociétés militaires privées aux pays anglo-saxons, singulièrement aux Britanniques et aux Américains. Ce secteur déjà très prospère avant les attentats du 11 septembre 2001 s'est considérablement développé avec ce drame, au point que 1 500 sociétés de ce type existeraient actuellement. Depuis plusieurs années, d'anciens militaires ou des entrepreneurs sans relation antérieure avec les affaires de défense cherchent à faire sauter le tabou qui leur interdit de monter ce type d'entreprises en France. Il ne s'agit pourtant pas pour eux de conduire des opérations de guerre privées, comme il arrive à certaines sociétés anglo-saxonnes de le faire, mais plus simplement d'assurer les armes à la main des missions de protection en territoire étranger ou dans les eaux internationales.

Louable intention

Peine perdue ! Si des entreprises françaises ayant pignon sur rue se livrent à ces activités, notamment pour la protection de navires de commerce contre la piraterie, elles le font à partir de filiales immatriculées à l'étranger, dans des conditions souvent difficiles. En 2003, le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin avait fait voter une loi condamnant le mercenariat proposé par son prédécesseur Lionel Jospin. Ce texte légitime visait à empêcher des citoyens français de prêter leurs compétences guerrières à des coups d'État ou à des entreprises de déstabilisation de gouvernements étrangers. Cette louable intention a cependant "tué" pour des années toute tentative de mettre en place des sociétés militaires privées, dont les employés dûment contrôlés pourraient agir pour la bonne cause.

Deux parlementaires qui ne se représenteront pas devant les électeurs, le député socialiste Jean-Claude Viollet et son collègue UMP Christian Ménard, ont publié récemment un rapport préconisant "d'organiser le secteur. Cela suppose tout d'abord de légiférer afin de définir clairement un ensemble d'activités autorisées par la loi. Il pourra en découler un système d'agrément des sociétés et des employés à même de clarifier et d'assainir le marché. Ensuite, en tant que client, l'État devra adopter une stratégie d'ensemble pour accompagner la structuration du secteur". Le Secrétariat général de la Défense et de la sécurité nationale (SGDSN) travaille depuis des années sur le sujet, sans avoir vraiment débouché sur autre chose qu'une définition commune regroupant les entreprises de sécurité privée (SSP) et les sociétés militaires privées (SMP). Il convient de les appeler des ESSD (entreprises de services de sécurité et de défense).

Une période mal choisie

Les deux auteurs du rapport n'ont pas craint de se lancer dans une période peu propice : la fin de la législature, doublée d'une campagne présidentielle, paraît bien mal choisie pour avancer ces propositions, dont rien ne garantit qu'elles trouveront grâce aux yeux du prochain pouvoir. Il se dit aujourd'hui que l'Élysée est extrêmement réticent à changer les choses, quand Matignon et les armées seraient plus ouvertes. En réalité, la sémantique a fait des ravages, et ces entreprises privées pâtissent de l'image laissée par les mercenaires et autres soldats de fortune, naguère représentés par Bob Denard.

Sauf que c'est l'opprobre les environnant qui bloque aujourd'hui toute évolution, admettent les députés : "La vigueur de la condamnation, pour justifiée qu'elle soit, a cependant entraîné dans la suspicion toute association entre les champs militaires ou de défense et l'activité marchande, notions que le sigle SMP marie explicitement. Pourtant, il n'y a rien de commun entre les prestations d'ingénierie proposées par les grandes ESSD françaises et l'action menée jadis par Bob Denard et ses associés."

Vaste secteur

Est-ce à dire que tout est bloqué ? Pas vraiment. Pour peu qu'elles se conforment à la loi française, plusieurs entreprises agissent dans ce secteur, y compris dans des zones à risque. Les sociétés Gallice ou Geos, pour ne citer qu'elles, sont présentes dans la protection anti-piraterie en employant des gardes armés de part et d'autre de l'Afrique, avec l'accord des autorités françaises. Mais le secteur est vaste et d'autres entreprises fonctionnent déjà dans le domaine de la formation de forces de sécurité étrangères, comme la société Strike Global Services, fondée à Paris par Peer de Jong, un ancien colonel des troupes de marine, et Jérôme Paolini, un investisseur qui fut le collaborateur de François Fillon à Matignon.

Interrogée par Le Point.fr, la société se refuse à commenter "pour l'instant" des activités en phase de démarrage. Elle se contente de préciser que ses employés ne sont pas armés, et qu'ils assureront "avec l'aval des autorités françaises des missions de formation, contribuant à aider des forces africaines à atteindre des standards internationaux, notamment pour les opérations de maintien de la paix".

Jean Guisnel, Défense Ouverte, Lepoint

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