Et si l'Iran devenait une source de stabilité au Moyen-Orient...
ANALYSE
Même si les négociations pour un accord sur le nucléaire iranien n'ont pas abouti, la poursuite des pourparlers jusqu'en juin 2015 signifie qu'une entente est toujours possible. Un signal positif pour les investisseurs, car la réintégration de ce pays dans la communauté internationale permettrait de stabiliser le Moyen-Orient et d'y améliorer le climat d'investissement. Le groupe P5 + 1 (États-Unis, Russie, Chine, France, Royaume-Uni et Allemagne) essaie d'empêcher l'Iran, un pays de 77 millions d'habitants, de fabriquer une bombe atomique à partir de son programme nucléaire civil. L'accord intérimaire intervenu il y a un an, le 24 novembre 2013, obligeait le pays à freiner ses activités nucléaires en échange d'une réduction limitée et graduelle des sanctions internationales (États-Unis, Europe, ONU) qui étouffent son économie. Les deux parties s'étaient données un an - jusqu'au 24 novembre 2014 - pour conclure une entente finale, ce qui n'a pas été possible. Selon les grandes puissances, la fabrication d'une bombe atomique par l'Iran serait une catastrophe, car elle pourrait déclencher une course à l'armement au Moyen-Orient. L'Arabie saoudite sunnite - hostile au régime chiite iranien - pourrait alors développer à son tour son propre arsenal. L'Iran doté d'armes nucléaires serait le pire cauchemar d'Israël, car des dirigeants iraniens ont déjà menacé par le passé de détruire l'État israélien - qui, lui, a déjà la bombe atomique. Le prolongement des négociations se veut en fait une stratégie des petits pas, jusqu'à la nouvelle échéance du 30 juin 2015. Pourquoi le retour de l'Iran sur la scène internationale est souhaité ? Ainsi, jusqu'à cet été, l'Iran bénéficiera d'une levée partielle des sanctions (700 millions de dollars américains par mois) pendant ces nouveaux pourparlers. En contrepartie, Téhéran s'est engagé à limiter ses capacités d'enrichissement d'uranium, le combustible indispensable pour fabriquer une bombe atomique. Un éventuel accord permettant à l'Iran d'avoir un programme nucléaire civil sans qu'elle se dote d'un arsenal nucléaire - le pays devra en contrepartie avoir l'assurance que les États-Unis ne l'attaqueront jamais afin de renverser son régime - serait une grande avancée pour la stabilité du Moyen-Orient, estiment les analystes. On l'oublie souvent, mais l'Iran a toujours été une puissance régionale au Moyen-Orient. Or, depuis la révolution iranienne de 1979 et la rupture de ses relations diplomatiques avec les États-Unis, le pays est au ban de la communauté internationale. Mais ce statut pourrait changer dans les prochains mois, et nous pourrions assister à un retour de l'Iran sur la scène internationale. D'une part, parce que les grandes puissances - surtout les États-Unis - comprennent qu'elles ont besoin de l'Iran pour combattre l'organisation sunnite État islamique (EI) qui bouleverse l'échiquier politique au Moyen-Orient. D'autre part, parce la majorité des Iraniens en ont assez et sont fatigués des sanctions internationales qui minent l'économie du pays, et qui privent par exemple la population de certains médicaments.
Le rôle que pourrait jouer l'Iran contre l'Etat islamique et en Syrie .
Actuellement, l'Iran n'est pas officiellement un pays membre de la coalition pour combattre l'EI en Irak et en Syrie, même si Téhéran soutient l'Irak (dirigée par des Chiites) et le régime syrien (également dirigé par des Chiites). Il va sans dire qu'une réintégration de l'Iran dans la communauté internationale permettrait d'accroître son rôle dans la lutte contre les djihadistes. L'Iran pourrait aussi aider l'Occident à trouver une issue à la guerre civile en Syrie. Mais ce conflit est très complexe: les Occidentaux soutiennent l'opposition, tandis que Téhéran appuie le régime de Bachar Al-Assad. Mais là encore, l'Iran pourrait sans doute jouer un rôle positif dans ce conflit, en tentant par exemple de convaincre Bachar Al-Assad de faire des concessions à l'opposition, mais sans lui demander de quitter le pouvoir. Téhéran tient à préserver «l'axe chiite» composé de Iran, de l'Irak, de la Syrie et du Hezbollah libanais - un mouvement politique chiite du Liban qui possède une branche armée. Une normalisation du statut de l'Iran avec les grandes puissances pourrait aussi peser sur les relations tendues entre le Hezbollah et Israël. Comme l'Iran est un allié du Hezbollah, elle pourrait faire pression sur ce dernier pour normaliser à son tour ses relations avec l'État israélien. Reste à voir si l'Iran et le P5 +1 arriveront à trouver un terrain d'entente. Car plus le temps passe, plus le camp des conservateurs hostiles à l'Iran aux États-Unis - renforcé par la récente élection d'un Congrès républicain - et les «durs» du régime iranien hostiles aux États-Unis risquent de torpiller une éventuelle entente.
Source : http://www.lesaffaires.com/monde/asie/et-si-l-iran-devenait-une-source-de-stabilite-au-moyen-orient/574486
Relayé par Armand Taï